Et si les Scop avaient finalement de l’avenir ?


On se souvient de la faillite de Railcoop l’an dernier, et de son idée de rouvrir la ligne ferroviaire entre Bordeaux et Lyon, mais d’autres projets comme la reprise de Duralex ou celle de Fralib près de Marseille montrent que le statut coopératif peut aussi être un gage de réussite. À l’inverse, la piste coopérative a été récemment écartée dans le dossier de reprise de Vencorex, en Isère.

En Nouvelle-Aquitaine, la Scop Copland a choisi dès sa création il y a 45 ans ce statut atypique. Montée par douze salariés qui venaient à l’époque d’être licenciés d’une première entreprise d’électricité, la société basée à Samadet, dans les Landes, emploie aujourd’hui 250 personnes. Spécialisée dans la pose et l’intervention sur les réseaux électriques et de télécommunication, elle a pour clients EDF et les gestionnaires du réseau d’électricité tels que RTE et Enedis.

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« Une entreprise particulière »

« Dans une Scop, les gens méritants ont directement la récompense de leur travail puisqu’on partage la moitié du résultat. Ils sont donc davantage investis », résume Alexandre Hedri, PDG de Copland après être passé par de grands groupes comme Veolia ou Bouygues. Il se souvient qu’à son arrivée dans l’entreprise en 2013, « c’était l’anarchie et à qui vendra sa voix pour élire le PDG [lui-même salarié de la Scop] et obtenir en échange un avantage par rapport aux autres. On était dans un fonctionnement politique. Cela n’a pas été facile mais j’y ai mis fin. »

Aujourd’hui, Copland possède des agences jusqu’en Martinique et opère des chantiers jusqu’en Scandinavie. « C’est une entreprise particulière, témoigne Numa Bataille, entré il y a 20 ans comme dessinateur et aujourd’hui directeur adjoint. On est dans une ambiance familiale, en tout cas au siège. Il y a une solidarité entre nous. S’il y a une urgence à cause d’une tempête par exemple, les gens vont revenir travailler le dimanche même s’ils ne sont pas d’astreinte. Pour l’intéressement et la participation, du PDG au manœuvre, on a tous la même prime, associé ou non. Le problème, c’est que c’est toujours assez difficile de faire entrer dans l’encadrement des gens de l’extérieur. »

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Même si la loi ne le précise plus, à candidature égale, une Scop est souvent privilégiée dans l’attribution de marchés publics comme ceux d’EDF. « Le problème, s’agace Alexandre Hedri, c’est que nous ne sommes aidés et pris au sérieux ni par les pouvoirs publics ni par les banques car on accuse aujourd’hui les Scop d’être des « sangsues à la subvention ». Le statut a été dévoyé. On peut être social et solidaire sans ouvrir un restaurant adapté, faire du maraîchage bio ou échanger des pizzas contre des carottes et des navets ! Le mouvement national des Scop a été phagocyté par cette économie bobo gauche caviar écologiste. »

Malgré ces freins, Copland affiche 10 à 15 % de croissance chaque année et affiche 35,5 millions d’euros de chiffre d’affaires et six millions d’euros de fonds propre en 2024.

Pas une entreprise autogérée

La France compte aujourd’hui environ 4 500 Scop, dont un peu plus de 500 en Nouvelle-Aquitaine. D’autres pépites existent dans la région comme la chaudronnerie industrielle CITBA à Arthez-de-Béarn, dans les Pyrénées-Atlantiques. Créée en 1976, elle compte aujourd’hui 130 salariés. On retrouve en théorie les Scop dans tous les secteurs d’activités mais près de la moitié exercent dans le domaine des services.

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« Les membres d’une coopérative ont une double qualité, assure Marc Amorena, président de l’Union régionale des Scop de Nouvelle-Aquitaine. En plus d’être salariés, la plupart sont associés lorsqu’ils sont en assemblée générale et qu’ils votent. Pour les porteurs de projets, toute la subtilité est d’appréhender ce double statut. »

Souvent créée par les ouvriers licenciés d’une entreprise en faillite, la Scop est aussi un outil privilégié en cas de départ à la retraite du dirigeant pour permettre à ses employés de reprendre la société. On retrouve également parmi les Scop d’anciennes associations dont la gouvernance s’était retrouvée bloquée à cause d’un trop fort développement. La plus ancienne Scop de Nouvelle-Aquitaine est l’imprimerie du Labourd à Bayonne. Elle affiche fièrement plus d’un siècle d’existence. Selon l’Insee, le taux de pérennité des Scop à cinq ans atteint 79 % contre 61 % pour les sociétés classiques, de droit commun.

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