Environnement : est-ce vrai qu’acheter en ligne pollue moins qu’acheter en magasin ?

C’est une phrase qui a pu étonner les auditeurs de franceinfo. Jeudi 25 avril, le directeur général d’Amazon Frédéric Duval a déclaré qu’« acheter sur internet est plus vertueux [pour l’environnement] qu’acheter dans un commerce de détail traditionnel ». Questionné, il a enchaîné : « Ce n’est pas moi qui le dis, c’est l’Ademe ». Et en effet, c’est l’une des conclusions d’un rapport de l’Agence de la transition écologique paru en 2023, mais cela mérite d’être détaillé et expliqué.

Dans ce rapport, consacré à l’étude de l’impact environnemental des commandes en ligne, l’agence fait plusieurs simulations de l’achat d’une paire de chaussures selon plusieurs scénarios : achat en ligne avec livraison à domicile, avec livraison en point de retrait, ou achat en magasin. Cela lui permet de comparer ensuite les conséquences environnementales de chaque scénario. L’Ademe conclut que, globalement, acheter dans un magasin pollue davantage qu’acheter en ligne, à condition de ne pas commander des chaussures à l’autre bout du monde.

Les achats en magasin plus polluants, même en prenant les transports en commun

Le poids élevé de l’empreinte carbone d’un achat en magasin est principalement dû au transport. Par exemple, on pollue trois fois plus en prenant exprès sa voiture personnelle thermique pour parcourir 10 km (distance étudiée par l’Ademe) et aller acheter une paire de chaussures en magasin, que quand un livreur nous amène un colis directement chez nous parce que, lui, va livrer plusieurs paquets pendant sa tournée et son empreinte carbone sera en quelque sorte « étalées » sur toutes ces livraisons. C’est plus optimisé et rationnalisé.

Si on profite d’un déplacement en voiture déjà prévu pour faire un petit détour et acheter des chaussures en magasin, alors on pollue tout de même encore deux fois plus qu’en attendant une livraison chez nous. Et, selon le rapport de l’Ademe, on pollue encore davantage qu’une livraison à domicile quand on prend les transports en commun pour aller faire les boutiques. Finalement, le seul scénario dans lequel acheter en magasin pollue moins, c’est quand on s’y rend à vélo ou à pied.

La livraison en point de retrait fait figure d’entre-deux, car le consommateur doit se déplacer jusqu’au point de retrait pour récupérer son colis. Son empreinte carbone est plus élevée que celle d’une livraison à domicile s’il s’y rend en voiture, en parcourant exprès 3 km (distance étudiée par l’Ademe). Elle est aussi élevée qu’une livraison à domicile d’un colis très emballé si on va au point de retrait en transport en commun. En revanche, la livraison en point de retrait est moins polluante si on va récupérer son colis à vélo ou à pied.

Transport aérien, suremballage et échecs de livraison

Néanmoins, tout cela ne tient que pour les achats en ligne dont les colis n’empruntent pas la voie aérienne pour parcourir au moins 800 km. Si la paire de chaussures vient de Berlin et qu’elle est envoyée par avion à Paris avant d’être livrée à votre domicile, là, votre empreinte carbone est bien plus élevée. Encore pire si elle vient de Chine. Dans ce cas-là, acheter sur internet pollue plus que quasiment tous les scénarios d’achat en magasin, qui ont été étudiés par l’agence. Sachant que, selon l’Association internationale du transport aérien (Iata), 80% des envois transfrontaliers liés à l’e-commerce ont emprunté la voie aérienne en 2021.

Cela dit, ce résultat peut aussi être nuancé par le fait que l’étude de l’Ademe ne prend pas en compte l’origine des chaussures qui sont entreposées dans les stocks des vendeurs en ligne ni de celles qui sont vendues en magasin. Si l’on prend sa voiture pour aller acheter dans un magasin des chaussures qui viennent de l’autre bout du monde et qui ont pris l’avion, alors on peut imaginer que l’impact environnement est encore plus élevé.

Précisions, en conclusion : si la livraison à domicile sans recours au transport aérien est le mode d’achat le moins polluant selon l’Ademe, plusieurs facteurs alourdissent tout de même son impact environnemental, comme le suremballage des produits, les échecs de livraisons ou encore les retours de colis.



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