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Réflexions sur la Liberté Politique selon Machiavel dans un Contexte de Conflit

_Portrait posthume de Nicolas Machiavel_ (1500), par le peintre florentin Santi di Tito (1536-1603), huile sur toile, Palazzo Vecchio, Florence (Toscane).

La crise actuelle de la démocratie soulève la question de son renouvellement à travers les leçons historiques de ses concepteurs. Ce texte explore l’opinion de Machiavel (1469-1527), qui considère la conflictualité comme un aspect inéluctable de la politique, menant à un besoin d’organisation et d’armement du « peuple » afin de résister à la domination des puissants et à l’impérialisme des États voisins.


Machiavel, haut fonctionnaire de la République de Florence, considère la **survie des États** comme un objectif primordial. Pour lui, le régime politique est indissociable du contexte de tensions et de guerre qui le caractérise.

Le régime idéal, selon Machiavel, doit garantir à la fois la **liberté** et la **puissance**, permettant ainsi une fondation solide de l’État sur le long terme. Cette approche préfigure une science politique plus pragmatique qu’altruistique, cherchant à allier idéal politique et réalités concrètes.

Un Républicanisme de Base

Bien que Machiavel ne soit pas exactement considéré comme un penseur démocratique, il est indiscutablement un républicain passionné. Les républicains de son époque s’efforcent de :

  • Élargir le pouvoir politique au-delà de l’aristocratie.
  • Incorporer la classe moyenne dans la vie scolaire et politique, traditionnellement réservée aux élites.

Le fait qu’il parle de **République** évoque une structure où, à l’instar de Rome, la citoyenneté est limitée.

Jusqu’au milieu du XIXe siècle, l’élargissement de la citoyenneté est un enjeu central pour les républicains. Comme la classe moyenne devient majoritaire, ce modèle républicain peut établir un fondement théorique pour les démocraties modernes.

L’Importance de la Puissance

Machiavel fait face à la **division sociale** vue comme une donnée inévitable. Le cadre légal doit permettre cette pluralité, mais aussi éviter les dérives tyranniques. Les « Grands » cherchent à dominer, et il est essentiel de leur opposer un contre-pouvoir fort en armant les classes moyennes.

Le contexte machiavélien est marqué par la **nécessité de la puissance** pour garantir la survie. Bien que le peuple cherche à éviter l’asservissement, la république doit maintenir une **force militaire** pour défendre ses intérêts tant internes qu’externes.

Pour Machiavel, la politique est fondée sur l’appétit humain. Il divise ainsi la société en trois groupes :

  • Les Grands, cherchant à dominer.
  • Les vulnérables, acceptant un statut subordonné.
  • La classe moyenne, qui aspire à un équilibre.

Il établit que l’État ne peut ignorer la **nature inégale des rapports de pouvoir** et doit fonctionner en conséquence.

Il propose aussi que la **loi** et les **armes** doivent coexister : la loi seule est insuffisante pour juguler l’avidité des dominants. Le peuple doit être armé pour garantir le respect des lois établies.

Préparation à la Guerre

Pour Machiavel, un état de paix cache souvent les prémisses d’une future guerre. Il préconise :

  • La préparation militaire continue pour éviter les conflits,
  • Le pacifisme peut devenir dangereux sans une force armée adéquate.

Avec les **guerres d’Italie** comme toile de fond, il pense qu’un pacifisme vain sera toujours à la merci des invasions.

Ce pragmatisme contraste nettement avec les idées d’une **paix perpétuelle** promues par des intellectuels comme Kant. Machiavel soutient que la paix durable ne peut être obtenue que par un équilibre de **puissances impériales**.

La Liberté À Quel Prix ?

Une question vitale se pose : sommes-nous prêts à sacrifier nos vies pour la liberté, soutenue par notre patrie ? Machiavel croit fermement que seule une nation armée peut conserver sa liberté face à la menace externe et les ambitions des Grands.

La **valeur de la vie**, dans une perspective machiavélienne, ne se limite pas à une vision chrétienne du sacré. La vie est avant tout un choix collectif au sein d’une structure politique, et l’individu doit se demander ce qui en fait un choix significatif.

Conclusion

Machiavel offre une vision républicaine sans équivoque, appelant à une discussion radicale sur la tyrannie. En rejetant les perspectives chrétiennes traditionnelles, il favorise une **religion civique** inspirée de Rome. Ce cadre soulève de nombreuses questions quant à la place de la politique dans la sphère publique moderne.


Jérôme Roudier est l’auteur de Machiavel par lui-même (PUF, 2025).

The Conversation

Jérôme Roudier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

Auteur : Jérôme Roudier, Professeur de philosophie politique, Institut catholique de Lille (ICL)

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Date de publication : 2025-07-26 07:57:00

Auteur : Cédric Balcon-Hermand – Consulter sa biographie, ses projets et son travail. Cet article a été vérifié, recoupé, reformulé et enrichi selon la ligne éditoriale Artia13, sans reprise d’éléments protégés.

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Cédric Balcon-Hermand

Depuis 1998, je décrypte les mécanismes de l'information, de la manipulation et du pouvoir symbolique. Fondateur d'Artia13, je mets mes compétences en analyse des médias, enquêtes sensibles et cybersécurité au service de projets éducatifs et citoyens. Défendre la vérité, outiller les esprits critiques et sécuriser le numérique sont au cœur de mon engagement.