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John Singer Sargent et le scandale de « Madame X »

John Singer Sargent et le scandale de « Madame X »

Mise à jour le 2025-09-27 14:14:00 : Le Musée d’Orsay présente une rétrospective sur John Singer Sargent. À 28 ans, il crée son chef-d’œuvre « Madame X », un tableau controversé.

Ce portrait a provoqué un véritable émoi dans le monde de l’art à sa présentation en 1884. La réaction du public a été intense, mêlant admiration et critique acerbe. Ce tableau, qui dévoile une femme dans une pose audacieuse, soulève des questions sur la moralité et l’identité culturelle.

Ce qu’il faut savoir

  • Le fait : John Singer Sargent a peint « Madame X », un portrait controversé.
  • Qui est concerné : Les amateurs d’art et le grand public.
  • Quand : Présentation au salon de 1884.
  • Où : Paris, France.

Chiffres clés

  • 4 770 $ : prix de vente de l’œuvre au MET en 1916.

Concrètement, pour vous

  • Ce qui change : Une redécouverte de l’œuvre de Sargent et de son impact sur l’art moderne.
  • Démarches utiles : Visiter l’exposition au Musée d’Orsay.

Contexte

Le nom de John Singer Sargent vous est peut-être inconnu. Le Musée d’Orsay lui redonne toutes ses lettres de noblesse avec une magistrale rétrospective, « John Singer Sargent Éblouir Paris  » ayant débuté le 23 septembre dernier. À seulement 28 ans, il peint son chef-d’œuvre « Madame X ». Retour sur l’itinéraire d’un scandale pictural sans précédent.

En 1874, le monde de l’art connaît un bouleversement avec la première exposition impressionniste. Un second se prépare insidieusement avec l’arrivée la même année d’un jeune peintre américain de dix-huit ans à Paris, John Singer Sargent. Dans la ville Lumière, il parfait son talent, déjà reconnu comme virtuose, en suivant pendant quatre ans l’enseignement de l’éminent portraitiste Carolus-Duran. Il parachève sa formation à l’École des beaux-arts de Paris.

Sa carrière prend un tournant à l’aube des années 1880 quand il rencontre Virginie Amélie Avegno Gautreau. Originaire d’Amérique, elle est venue s’installer en France à l’âge de huit ans. En 1879, elle épouse Pierre Gautreau, un homme d’affaires. Sa réputation n’est plus à faire dans le tout Paris, où elle resplendit par sa beauté et le soin qu’elle porte à ses toilettes.

John Singer Sargent est bien décidé à faire son portrait. Après plusieurs refus, elle finit par se laisser séduire par l’idée d’un tableau du peintre. Au vu de la popularité de la jeune femme, l’artiste pensait se faire remarquer au prochain salon des artistes français à Paris.

Avec ses deux mètres de hauteur, l’œuvre représentant la mondaine ne passe pas inaperçue au salon de 1884. L’œil du public est tout de suite accroché par une longue robe noire dont le décolleté, dessiné en cœur, laisse apparaître la naissance de sa poitrine. Aucun apparat ne vient orner son cou, le peu de dorure présent s’installe dans les attaches de sa robe.

Une bretelle qui fait mouche 

Dans l’exposition du musée d’Orsay, les spectateurs pourront découvrir la jeune femme vêtue de sa robe ébène, les bretelles reposant sur ses deux épaules. L’originale présentait un agencement de sa tenue tout autre. La bretelle de sa robe était baissée, offrant à tous la vue d’une épaule dénudée. En dévoilant plus que de raison, selon le public, l’anatomie de la Virginie Gautreau John Singer Sargent commet fait une atteinte à la moralité. Le fait qu’un peintre américain brosse le portrait d’une Américaine à Paris est aussi sujet à polémique.

L’apparence de Virginie Gautreau va être prise à partie par le public. Sa pose de profil rappelant celle présente sur les pièces de monnaies romaines déplaît. Son teint pâle, qu’elle accentue en se poudrant au chlorate de potassium, est aussi raillé. Il est apparenté à celui d’un cadavre. Dans une lettre d’un des amis du peintre, Ralph Curtis, le déroulement de l’événement est raconté : « Hier, c’était l’anniversaire ou les funérailles du peintre John Sargent.(…) En quinze minutes, j’ai entendu tout le monde dire “où est le portrait de Gautreau ?”, “Oh allez voir ça”. John était très nerveux, mais ses peurs étaient bien dépassées. Il y avait un grand tapage avant toute la journée. En quelques minutes, je l’ai trouvé en train d’esquiver les portes pour éviter des amis artistes. » L’œuvre divise autant qu’elle émerveille « Toutes les femmes se moquent. Ah voilà “la belle !”,“Oh quelle horreur !”. Puis un peintre s’exclame “superbe de style”, “magnifique d’audace !”, “quel dessin !”. »

Devant ces nombreuses réactions, le modèle et sa mère ont demandé des comptes  à l’artiste :  « Madame Gautreau et sa mère sont venus à son atelier, baignées de larmes. Je les ai empêchées de venir, mais la mère est revenue et a fait une scène effrayante “ Ma fille est perdue, tout Paris se moque d’elle, Mon gendre sera forcé de se battre. Elle va mourir de chagrin.” John répondit qu’il était illégal de retirer un tableau. Il l’avait peinte exactement comme elle était habillée, et on ne pouvait rien dire de la toile. »

Les critiques sont assassines. Pour « La Revue des Deux Mondes  »  Henry Houssaye couche sur le papier que « Le profil est pointu, l’œil microscopique, la bouche imperceptible, le teint blafard, le cou cordé, le bras droit désarticulé, la main désossée; le corsage décolleté ne tient pas au buste et semble fuire le contact de la chair. Faire d’une jeune femme justement renommée pour sa beauté, une sorte de portrait-charge, voilà à quoi mènent le parti pris d’une exécution lâchée et les éloges donnés sans mesure.  » Dans « L’Illustration » Jules Comte dira de l’œuvre « quelle amère désillusion nous attendait devant l’œuvre du peintre (…) mais comment a-t-il pu songer à peindre ainsi Mme. X . . . sèche, rêche, anguleuse ? (…) Jamais nous n’avions vu pareille déchéance d’un artiste qui avait semblé donner plus que des espérances.» 

Un départ pour Londres

Désabusé John Singer Sargent décide de quitter la France. Il se perd dans le  fameux brouillard de Londres, décrit avec brio par Charles Dickens, où de nombreuses commandes l’attendent. Il connaît les honneur en étant nommé à la Royal Academy.

De son côté, Virginie Gautreau ne se laisse pas abattre. Deux semaines après la présentation du tableau, elle assiste à une représentation théâtrale, vêtue de la robe de tous les scandales. Un pied-de-nez qu’elle réitère au courant de l’année 1891 en demandant à Gustave Courtois de réaliser un portrait de profil, à la bretelle tombante.

Un second souffle

Le tableau fut précieusement gardé par le peintre dans son atelier, à l’abri des regards indiscrets, pendant une vingtaine d’années. Malgré le scandale qui a habité l’œuvre, il considère que c’est la meilleure chose qu’il a faite comme il le couche sur papier dans une de ses correspondances avec Ned Robinson, alors directeur du Metropolitan Museum of Art à New York.

Alors que le portrait est de passage en Amérique pour une exposition, John Singer Sargent propose de le vendre à la célèbre institution américaine. Une demande qui ne manque pas de surprendre Ned Robinson : « J’ai essayé en vain pendant des années de lui obtenir ce tableau… mais pour des raisons personnelles, il a toujours refusé de s’en séparer, et son changement d’avis est donc une surprise totale. » comme le rapporte le site du MET. L’œuvre sera vendue au  MET en 1916 pour la modique somme de 4 770 $. Le peintre demande qu’au vu des différents entretenus avec le modèle, d’anonymiser la toile. Ainsi le tableau devient Portrait de Madame X.

Sources

Source : Elle

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Date de publication : 2025-09-27 14:14:00

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Cédric Balcon-Hermand

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